Nous ne sommes pas peu fiers d’avoir, suite à une croisière à la voile d’observation et d’étude des cétacés, écrit un livre. Dans « Les allumeuses de méduses », Galway le voilier raconte la merveilleuse épopée d’un groupe de filles partie observer les baleines en Méditerranée.
Voici un extrait de ce carnet de bord, débordant de poésie, d’humour, et de faits relatés plus techniques :
* La Cheffe *
Je reviens tout juste d’une croisière, que déjà on me prépare pour la future ! L’année dernière c’est mon voisin, Bel Aventure, qui était parti avec Wild Seas Explorer. Cette année, le pauvre a perdu son mât[1]. J’hérite de la charge de le remplacer ! Je dois gagner la confiance de la Cheffe, pas l’choix ! De fond en cales[2] je suis donc nettoyé ! Des plongeurs me titillent la coque… Frottent… Grattent… Pour débarbouiller ma carène[3] de ses algues ! Je filerai comme le vent ! Comme une frégate…
– « Galway, tu es là ? »
– Oui… J’espère que tu m’entends…
17h. Je rencontre ma Cheffe pour la première fois ! Arrivée à bord, elle pose ses jumelles… Son appareil photo… Dans un soupir de soulagement, elle murmure :
-« Nous y voilà ! Toi, moi, eux, le large maintenant ! »
-Ouf, tu m’entends…
C’est la première arrivée, évidemment. Elle prend le temps de s’installer… De s’imprégner… Elle range les livres en premier ! Sur les cétacés… L’écologie marine… La navigation ! Elle les pose un à un sur mes bois… Délicatement… Les pages de quelques livres ont été agglutinées. Cet encollage date de l’année dernière. Les embruns marins les ont collées, figées, lors de la précédente virée en mer… Elle sépare les pages de quelques livres, consciencieusement. Certains mots se déchirent. Quelques illustrations palissent. Elle n’aime pas ça ! Cette année, elle insistera pour que les livres ne soient pas sortis sur mon pont… Elle a bien raison ! Elle dépose, tout près de ma table à carte, tout le matériel de collecte de données. Les jumelles, deux bonnes paires de qualité. L’hydrophone[4] venu tout droit d’Anacortes, Washington US. Les fiches d’observation et d’identification, rédigées et imprimées pour l’occasion. Elles serviront pour la collecte de données et pour reconnaître les espèces ! Les cartes de navigation sont déjà à bord… Elle range le gros filet et le collecteur, les palmes, masques et tubas dans mon coffre tribord[5].
– « Te voilà avec une tout autre allure ! Tu es transformé »
– Ah oui ? Effectivement, je me sens changé…
De navire de plaisance, je prends doucement mais sûrement le statut de voilier scientifique. Je me sens alors et incontestablement, de plus en plus investi dans la mission venant !
Elle répartit ensuite les cabines. Les deux plus petites seront pour elle et Valie. Les deux plus grandes pour Yannik et Yelena à bâbord[6], pour Alice et Elina à tribord. Elle dépose le linge de lit et de bain, individuellement dans chaque chambre… Elle ajoute aussi une brosse à dent en Bambou, un savon maison pour chacune et du dentifrice à l’argile… Elle me parle alors d’empreinte carbone ! Elle dit que ça pourrait changer la donne ! Et puis si chacun agit à son échelle, ça fait quand même huit milliards d’échelles… De quoi monter au ciel ! Elle souhaite aussi éviter les retours au port… Il faudra économiser mes réserves d’eau. Les douches se prendront à l’eau salée. L’eau douce c’est pour rincer ! Mais outre l’économie d’eau, c’est notre impact sur l’environnement qui l’inquiète… À expédition exceptionnelle, mesures exceptionnelles !
[1] Mât : longue pièce de bois ou de métal, dressée sur le pont d’un voilier, maintenue par des haubans et destinée à porter la voilure.
[2] Cale : volume compris entre le pont et le fond, destiné à recevoir la cargaison.
[3] Carène : partie immergée de la coque d’un bateau, on peut associer ce terme aux œuvres vives.
[4] Hydrophone : microphone destiné à être utilisé sous l’eau, pour mieux entendre les voix de la mer ! Ici l’hydrophone utilisé est un H1a.
[5] Tribord : droite du bateau.
[6] Bâbord : gauche du bateau.
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